En attendant résultats de l’essai RxPONDER
Comme vous le savez, si vous suivez l’actualité de l’Institut Français du Sein, nous avons la certitude qu’une partie des femmes atteintes d’un cancer du sein et dont les ganglions ne sont pas atteints n’ont pas besoin de la chimiothérapie qui leur est administrée. Il s’agit de femmes qui font partie d’un groupe majoritaire en France (celles dont les tumeurs ont un profil biologique particulier : présence de récepteurs hormonaux et absence de sur expression du gène Her2-Neu).
Institut Français du Sein : pourquoi moins de chimiothérapies ?
Depuis la publication en 2018 des résultats de l‘essai TAILORx, nous savons parfaitement identifier les patientes pour lesquelles une chimiothérapie est utile et qui pourraient être sauvées par la mesure (environ 20% de l’ensemble). Et, par là-même, éviter ce traitement à toutes les autres.
Il suffit pour cela d’avoir recours à un test génomique (c’est à dire qui étudie le fonctionnement des gènes dans la tumeur). Ce test a pour nom Oncotype DX et a démontré une pertinence stupéfiante au cours d'un des plus grands essais de phase III jamais réalisé en cancérologie mammaire.
Oncotype DX est réalisé en Californie sur un échantillon de tumeur récolté pendant l’intervention chirurgicale. Le test est effectué selon un protocole précis et, pour l’heure, peut bénéficier en France d’un remboursement total dans le cadre d’une procédure exceptionnelle (dépendant de la DGOS et non de l’assurance maladie) le RIHN. Cette procédure de remboursement est hélas limitée aux rares établissements qui ont passé des accords avec la société Exact Science (qui commercialise le test).
Pour des raisons qui nous demeurent obscures, Oncotype DX est donc peu utilisé en France (hormis par certaines équipes pionnières, privées ou publiques). L'institut Français du Sein est en pointe sur ce sujet. Le résultat de cette sous-utilisation se paie au prix fort : des milliers de Françaises reçoivent chaque année une chimiothérapie inutile avec son cortège de toxicités parfois sévères.
Chimiothérapie en cas d'atteinte des ganglions : la règle ?
La sélection des patientes indemnes d’atteinte ganglionnaire qui bénéficieraient d’une chimiothérapie étant scientifiquement résolue par l’usage d’Oncotype DX une seconde question se pose : qu’en est-il des patientes chez lesquelles les ganglions sont touchés ?
Nous savons que le risque de récidive est pour elles plus important. Pour autant, si la maladie est effectivement plus sévère, cela signifie-t-il qu’une chimiothérapie est toujours nécessaire ? Cette pratique, presque systématique, observée par nombreuses équipes de cancérologie, est-elle justifiée ou doit-elle être également modulée par l'étude du profil génomique des tumeurs comme nous la réalisons à l'Institut Français du Sein ?
À cette question, il fallait une réponse nette. Pour y parvenir, un essai de Phase III a été initié sur des bases proches de l’essai TAILORx, mais incluant cette fois des patientes qui avaient une atteinte des ganglions. De nombreuses équipes Européennes (les Français ont beaucoup inclus) ont participé à cet essai appelé RxPONDER.
Chimiothérapies : désescalade ?
Les premiers résultats de l'essai RxPONDER vont être publiés lors du prochain SABCS (ce congrès réunit chaque année à San Antonio -Texas- les cancérologues spécialisés dans le cancer du sein). Une très bonne nouvelle n’est jamais exclue : il se pourrait qu’on puisse éviter, en toute sécurité, grâce au test Oncotype DX, de nombreuses chimiothérapies inutiles pour le groupe de patientes dont les ganglions sont touchés.
Une réponse sera donnée le 10 Décembre à San Antonio. Nul doute, et spécialement en période COVID où une chimiothérapie n'est pas forcément recommandable, que cette communication va être scrutée à la loupe. Il se pourrait que, par ricochet, si les résultats sont ceux escomptés, la communauté cancérologique française très réticente à la généralisation des tests génomiques soit enfin entraînée dans ce mouvement mondial de désescalade des chimiothérapies. C'est le plus grand souhait de l'équipe de l'Institut Français du Sein qui travaille depuis des années à cette désescalade.
Il serait, en effet, inconcevable de prescrire largement des chimiothérapies sans effectuer de tests Oncotype DX à des patientes dont les ganglions sont indemnes et réserver ce test aux autres. Le résultat de cette attitude serait paradoxal : plus de chimiothérapies pour les patientes indemnes d'atteinte ganglionnaire que pour les patientes touchées.
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